Mis à jour le 20 novembre 2020
Mise à jour 20 novembre : La Loi Recherche a été adoptée au sénat ce vendredi 20 novembre avec 244 voix pour et 95 contre. Elle avait rassemblé 188 votes pour, 83 contre et 12 abstentions à l’Assemblée Nationale mardi dernier. La ministre a pris la parole après chaque vote dans les deux hémicycles pour remercier les député·e·s et les sénateur·trice·s de la part de la communauté académique et de « tous les doctorants » et se féliciter d’ « un très beau texte qui porte beaucoup d’ambition et qui nous permet de regarder l’avenir avec un peu plus de sérénité ».
Suite à la demande des parlementaires de l’opposition, la loi doit encore passer devant le Conseil constitutionnel avant de pouvoir être appliquée (ou pas).
Alors que le vote de la Loi Recherche à l’Assemblée Nationale s’était passé dans l’indifférence et la résignation, la flamme de la mobilisation du milieu de la recherche est en train de se raviver au moment du vote de la version finalisée par la Commission Mixte paritaire du parlement.
Une grève « écrans noirs » en ligne a été lancée vendredi dernier avec suspension des cours en ligne, la Conférence permanente du Conseil national des universités (CP-CNU) a demandé la démission de la ministre Frédérique Vidal, les motions contre la loi fleurissent et des manifestations sont prévues sur les campus ce lundi 17 novembre après-midi pendant que la Loi passera une dernière fois devant l’hémicycle de l’Assemblée Nationale.
— PrecaireESR (@PrecaireESR) November 12, 2020
On aurait pu penser que cette loi budgétaire peu ambitieuse et pour un darwinisme social inégalitaire ne déclencherait plus de vague de protestation. Non pas que cette loi ne soit plus contestée par les principales et principaux intéressé·e·s mais le vote en plein confinement et la gestion des cours à distance ne permettent pas une pleine appropriation du débat par les acteurs et actrices de la recherche.
C’était sans compter sur la gourmandise de la droite sénatoriale avec l’assentiment du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche. La sénatrice LR Laure Darcos a d’abord poussé le sénat à restreindre les libertés académiques et pénaliser l’opposition à un débat dans les universités.
Lors de la commission mixte paritaire, l’abandon de ces amendements de Laure Darcos a servi de monnaie d’échange à la droite sénatoriale pour imposer deux nouvelles mesures avec l’accord du Ministère :
- L’article 3bis supprime la qualification du Conseil National des Universités pour les candidats à la fonction de professeur exerçant déjà en qualité de maître de conférence;
- L’article 20bis AA introduit une pénalisation des mouvements étudiants.
La pénalisation des mouvements étudiants scandalise les personnels déjà mobilisés, mais la suppression de la qualification mobilise une autre partie du personnels de l’ESR peu mobilisé habituellement : les enseignant·e·s chercheur·euse·s et chercheur·euse·s en droit qui sont très attaché·e·s à la qualification comme moyen d’éviter le favoritisme local lors des concours nationaux de la recherche publique.
Les sections 1 à 4 du Conseil national des universités (où l’on retrouve notamment les disciplines du droit) ont toutes voté des motions contre le vote de la Loi Recherche ces derniers jours.
Mais le lien entre le Conseil national des universités (CNU) et le ministère semble de plus en plus tendu. Après l’appel à la démission de la ministre par sa conférence permanente, Frédérique Vidal a attaqué le CNU dans une tribune au Monde :
« Il ne m’appartient pas de faire le procès éculé d’un CNU trop coûteux, trop lourd ou grevé de querelles internes »
Ces tentions ont poussées le CNU et la conférence des présidentes et présidents des sections et commissions interdisciplinaires (CPCN) à passer outre la Ministre et à s’adresser directement au Premier Ministre Jean Castex dans une lettre ouverte envoyée ce mardi :
Certains députés élus sous la bannière LREM se sont déjà montrés réceptifs aux arguments contre les nouvelles dispositions introduites par la droite parlementaire.
Matthieu Orphelin a tweeté qu’il voterait contre cette loi et Sacha Houlié a déposé une contribution dans laquelle il explique qu’il s’abstiendra « volontairement » lors du vote.
Malgré qq avancées je voterai CONTRE la loi pgmtion recherche #LPPR
⭕️Budget consolidé ms dilué sur 10 ans
⭕️Danger d'une dérive disproportionnée vs la liberté de manifester
⭕️Risque d'injustice et de favoritisme ds le recrutement en court-circuitant le #CNU
⤵️@UnivAngers #Angers pic.twitter.com/Gw4MBscHuI— Matthieu ORPHELIN (@M_Orphelin) November 16, 2020
La loi dont le vote solennel aura lieu à l’Assemblée nationale aujourd’hui doit faire ensuite un dernier passage vendredi 20 novembre au sénat pour être définitivement adoptée.
Photo d’illustration de Martin Clavey prise le 1er février 2020 à Saint-Denis (93)
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